di Philippe PREVAL
Pontus le grand.
Quelques amis ont apprécié le discret hommage à Pontus Hultén, qui était en fait un appel à ses mânes, qui concluait mon article très critique sur la scénographie de Beaubourg, publié ici même il y a quelques semaines. C’est l’occasion de consacrer quelques lignes à ce grand personnage à qui Paris, Stockholm et bien d’autres lieux doivent tant.
Pontus Hulten qui est né il y a cent ans à Stockholm, n’était pas seulement un directeur de musée ou un historien d’art, c’était un philosophe, un visionnaire, un artiste.
Il fallait au moins ça pour sortir Paris de sa torpeur, pour combler le fossé gigantesque qui séparait les institutions françaises de l’art moderne qu’elles avaient vu naître en grande partie sans jamais le comprendre, ni surtout l’acheter. Quand il prit les rennes du musée qui était encore un chantier de construction à peine ébauché, Pontus Hultén devait non seulement réveiller le bel endormi qui se prélassait en bord de seine (au Palais de Tokyo) dans sa torpeur provinciale mais aussi faire face à une levée de boucliers, menée en particulier par Jean Cassou, conservateur du musée de 1945 à 1967 et par bon nombre des donateurs ou ayant droit des artistes. Sans oublier l’immense mérite de Cassou qui était allé quémander quelques toiles auprès de Picasso, Braque, Léger et les autres après la guerre, force est de constater que le musée était très pauvre en surréalistes, en artistes américains d’après-guerre ou même en fauvisme. Il eut d’ailleurs été plus rapide de faire la liste des domaines couverts que des manques.
Mais avant de songer à combler les immenses lacunes de la collection, le viking dut d’abord convaincre qu’il n’était pas un barbare venu piller les chefs d’œuvre parisiens comme ses lointains ancêtres qui venaient fréquemment visiter les bords de seine. Il courait en effet le bruit que Beaubourg mettrait fin à l’inaliénabilité des œuvres et vendrait les toiles ou les sculptures qui lui seraient envoyées. Cet argument insensé était pourtant invoqué pour refuser le transfert des œuvres, par la veuve d’Henri Laurens par exemple.
Outre la nuance de xénophobie[1] qui animait la bonne bourgeoisie des arts parisienne, l’affaire n’était tout de même pas simple. Le projet de Georges Pompidou n’était en effet pas un simple musée. La tâche ne consistait pas à transférer les œuvres d’un bâtiment dans un autre. Beaubourg était plus qu’un musée, un centre culturel comprenant 4 départements : l’IRCAM (la création musicale), le CCI (centre de création industrielle, le design), la BPI (la plus grande bibliothèque parisienne en accès libre) et le Département des arts plastiques qui regroupait le musée national d’art moderne et le CNAC (centre national d’art contemporain) et qui avait également la charge des expositions. Pontus Hultén avait donc la charge d’un « département » et la responsabilité d’un peu moins de la moitié de la surface du centre. On peut comprendre que les esprits traditionnels aient été effrayés par l’ambition dérangeante du président Pompidou qui, au surplus était mort en avril 1974, avant que le chantier ne soit commencé.
Et pourtant le Centre Pompidou fut dès le début un immense succès auprès du public. Cette réussite dont la gestation dura trois ans, Beaubourg la doit à Robert Bordaz et à l’équipe de grands professionnels qu’il réunit, au premier rang desquels, Pontus Hultén. Quand il fut nommé par Robert Bordaz en 1973, sans doute à la suite de discussions avec le Président de la République -le couple Pompidou qui étaient de vrais amateurs d’art contemporain avait en effet voyagé en Suède et avait connu son travail de précurseur au Moderna Museet de Stockholm (1957-72)-. Pontus Hulten avait presque 50 ans et une solide expérience de directeur de musée, de concepteur d’expositions et aussi de cinéaste. Beaubourg lui permettait de réaliser à grande échelle les projets qu’il avait menés en Suède, c’est-à-dire la possibilité de mener une action sans cloisonnements entre l’art, la littérature, la science et la vie.
Il avait de profondes amitiés fortes dans le monde des arts et surtout quelques idées fortes, une muséographie ouverte et modulaire qui se situe dans la ligne de ses maîtres Willem Sandberg du Stedelijk Museum d’Amsterdam et Alfred Barr du Moma, la nécessité de disposer d’une collection encyclopédique qui de ce fait devait être considérablement enrichie, l’importance essentielle d’une documentation riche et d’archives pour proposer des salles d’études dans le musée et alimenter les exposition, le dialogue entre art contemporain et art moderne, son souci d’accueillir largement le public qui se manifesta par exemple par une heure de fermeture repoussée (tous les jours !) à 22 heures, et enfin sa conception novatrice de grandes expositions transdisciplinaires auxquelles tous les départements du Centre devaient être associés. La combinaison de ces différents axes ont fait du Centre Pompidou un lieu unique, rayonnant tant en France qu’à l’étranger. Ses huit années au Musée sont l’âge d’or du Centre Pompidou, et devaient (ou devraient) servir de référence à tous ceux qui l’ont dirigé après lui.
Mais avant de présenter sa première grande exposition consacrée à Marcel Duchamp qui fut un coup de tonnerre et rangea définitivement le vieux musée des bords de seine dans la boite contenant les cartes postales sépia du temps jadis, il lui fallut passer par bien des épreuves. D’abord il dut séduire un à un les caciques, les mécènes, les donateurs ou les ayants droits, les convaincre que le nouveau musée ne serait pas le cimetière des chefs d’œuvre, qu’il serait bien au contraire l’un des plus grands, des plus beaux et surtout des plus intelligents musées d’art moderne. Il dut ensuite rassembler autour de lui les autres directeurs de département et les emmener vers le pluralisme. Pierre Boulez manifesta son enthousiasme immédiatement, l’équipe du CNAC aussi, puis les équipes de la BPI, qui auraient une importance déterminante en faisant des expositions dossier et en organisant des revues parlées. Cela fut plus difficile avec les équipes historiques du musée et, pour des raisons de compétition, avec celles du CCI.
Il réussit ! Comment cet avion parvint-il à être assemblé et à décoller ? Il restera toujours sur ce point une part de mystère. Toujours est-il que dès la première exposition, la messe était dite. Et la vague d’enthousiasme ne fit que croître avec la trilogie magistrale “Paris-New York”, “Paris-Berlin”, “Paris-Moscou”. Ces grandes expositions pluridisciplinaires furent élaborées avec des spécialistes venant de tous les horizons et demandèrent des mois ou des années de travail, en particulier “Paris-Moscou”, pour laquelle des conservateurs ont passé des mois en URSS à rechercher des tableaux que tout le monde avait oubliés ou rejetés et qui sont aujourd’hui considérés comme des chefs d’œuvre. Les catalogues extraordinaires sont devenus des objets de collection que tout amateur d’art se doit de posséder et qui ont d’ailleurs fait l’objet, cas assez exceptionnel, de rééditions.
Le secret de ces expositions, de leur génie propre, c’était Pontus Hulten lui-même, c’était sa vision panoramique, sa capacité à rassembler des objets venant de diverses origines et à en faire un tout à la fois harmonieux et en constante mutation. A y bien réfléchir c’était déjà l’esprit de son mémoire sur Vermeer et Spinoza[2]. Le peintre et le philosophe sont nés la même année et morts à trois ans d’intervalle. Après le herem qui le chassa d’Amsterdam, Spinoza s’installa à Leyde, il habitait à quelques kilomètres du peintre, il vivait en fabriquant des lentilles et on pense que le peintre utilisait des dispositifs optiques. Ce n’est pourtant pas un travail de recherche d’anecdotes que propose le suédois. Arrivé au troisième tiers de son travail, il expose en quelques pages et avec une vraie compréhension la philosophie de Spinoza. Outre les passages qui ont engendré des soupçons d’athéisme, il commente en particulier sa vision du monde comme totalité, sa vision de Dieu comme « toute la nature »[3], et sa conception de la position de l’homme qui n’est plus en surplomb de la nature mais fait partie de celle-ci[4]. Cette position de l’homme parmi les choses, c’est la résonnance fondamentale qu’il identifie avec les tableaux de Vermeer où tout est représenté de la même façon et baigne dans la même lumière, contrairement à ses prédécesseurs comme Pieter Saenredam que l’auteur a étudié au début de son exposé. Cette représentation de la figure humaine parmi les objets, en relation avec eux, sans hiérarchie, c’est bien ce qu’on retrouve dans les grandes expositions de Pontus Hulten, nourries de méditation spinoziste devant les toiles cristallines de Vermeer.
Si les expositions permirent à Beaubourg de poser sa griffe dans le territoire culturel, c’est le Musée d’art moderne qui devait être son pôle d’attraction. Pontus Hultén, convaincu que la collection est la colonne vertébrale d’un Musée, et qu’un grand musée devait avoir une collection la plus complète possible, contribua de manière exemplaire à son enrichissement. Il sut obtenir de riches donations comme celle de Nina Kandinsky, dont il fit la marraine du musée, attira de très généreux mécènes, la fondation de Ménil ou la Scaler fondation, et fit de nombreuses acquisitions d’œuvres modernes et contemporaines. Il n’eut pas seulement une vision et une énergie infatigable. Il eut aussi de la chance ! Cette chance, ce fut la victoire de François Mitterrand ! Giscard avait ses qualités, mais il considérait un peu que la civilisation française s’était arrêtée au règne de Louis XV. Aller jusqu’à l’impressionnisme c’était déjà beaucoup.
Avec Mitterrand et Jack Lang son ministre de la Culture, les circonstances sourirent au suédois. D’une part le budget de Beaubourg augmenta, d’autre part l’art moderne trouva un terrain favorable. C’est ainsi en particulier que les dations de deux grands artistes surréalistes, Max Ernst et Man Ray, furent rattrapées au vol alors que le gouvernement précédant les avait refusées. La vertu appelant la vertu, les donations affluèrent, celle de Daniel Cordier[5], celle plus tardive mais faite dans le même mouvement de Michel et Louise Leiris[6] et ainsi Beaubourg reçut un jour dans cinq caisses, des formes de plâtre emballées dans du papier journal, c’était les Architectones de Kazimir Malevitch !
Le Musée lui-même cessa d’être un lieu froid et un peu compassé pour devenir un espace privilégié de connaissance et de participation. Outre l’ouverture jusqu’à 22 heures pour faciliter les visites des « travailleurs », ce qui est aujourd’hui copié presque partout mais une fois par semaine seulement (les nocturnes), il voulut changer le rôle traditionnel du gardien de musée afin que celui-ci, débarrassé de son uniforme, devint un agent de transmission de la connaissance qui fournissait des informations au visiteur tout en veillant à la sécurité des œuvres. Il voulut également faciliter l’accès aux réserves, ce qui ne put être réalisé et mit en place des ateliers pour enfants. L’espace du musée fut aussi conçu de manière particulière. Beaubourg est un musée sans murs, sans salle fixe. C’est un immense plateau qui a, à peu près, la surface d’un terrain de football. Au démarrage, le musée disposait d’un plateau et demi (aujourd’hui il en a 2).
Ce plateau qui flottait au-dessus des toits de Paris, qu’on pouvait apercevoir ou contempler par de nombreuses baies transparentes, il l’organisa en petits lieux marqués par des cloisons mobiles, avec une alternance d’espace présentant les chefs d’œuvre des principaux mouvements et de galeries d’étude présentant des dessins, des documents (livres, photographies, textes), des sculptures africaines, et d’autres œuvres en rapport. Cette alternance entre œuvres capitales (par exemple l’Arc noir de Kandinsky ou Udnie de Picabia) présentées souvent « en majesté » sur un mur blanc et espaces d’études souvent constitués de vitrines densément peuplées et commentées, permettait d’éviter les panneaux d’explication fastidieux et donnait au visiteur une sensation de liberté et de fluidité incomparable. Qualifiée d’utopique par ses opposants, cette conception qui faisait écho à l’esprit de 1968, fut largement plébiscitée par les Parisiens. Contre toute attente, la fréquentation du public fut très importante dès l’ouverture.
Comme il l’avait fait à Stockholm avec en particulier La Mariée de Niki de Saint Phalle, gigantesque « nana » allongée sur le dos, les jambes écartées dont le sexe béant servait de porte d’entrée à l’exposition, il mit en lumière des artistes contemporains. Les visiteurs découvrirent l’impressionnant Crocrodrome de Zig et Puce (1978) de Tinguely, ou les mires de Dubuffet en 1983 (et les non-lieux l’année suivante).
Pour des raisons qui appartiennent à l’histoire mais dont il est difficile de ne pas regretter les conséquences, le suédois quitta son fier navire en 1984. il voyagea, il eut d’autres projets, à Los Angeles, au Palazzo Grassi, puis à Paris. Aucun cependant ne fut marquant. Il reste le génial directeur du Département des arts plastiques du Centre Pompidou, alias Beaubourg, qui repartit un froid matin vers son grand nord natal, sans une rue à son nom, sans une statue, sans une salle, sans même cette légion d’honneur qu’on donne pourtant si facilement à des génies de la coordinations pied-tête, ou à des artistes de la poêle à frire.
Philippe PREVAL Paris 6 Octobre 2024
Versione Italiana
Pontus il Grande.
Alcuni amici hanno apprezzato il discreto omaggio a Pontus Hulten, che era di fatto un richiamo al suo spirito, con cui concludevo il mio articolo molto critico sulla scenografia del Beaubourg, pubblicato qualche settimana fa ( Cfr ).
È l’occasione per dedicare qualche riga a questo grande personaggio al quale Parigi, Stoccolma e tanti altri luoghi devono tanto. Pontus Hulten, nato cento anni fa a Stoccolma, non è stato solo un direttore di museo o uno storico dell’arte, era un filosofo, un visionario, un artista. Occorreva almeno questo per far uscire Parigi dal suo torpore, per colmare il gigantesco divario che separava le istituzioni francesi dall’arte moderna che avevano vista nascere in gran parte senza mai capirla, né soprattutto comprarla. Quando prese le redini del museo, che era ancora un cantiere appena iniziato, Pontus Hulten dovette non solo risvegliare la bella addormentata che giaceva sulle rive della Senna (al Palais de Tokyo), ma anche far fronte alle proteste in particolare di Jean Cassou, curatore del museo dal 1945 al 1967 e di molti dei donatori o beneficiari degli artisti. Senza voler trascurare i grandi meriti di Cassou che andò a elemosinare alcuni quadri di Picasso, Braque, Léger e altri dopo la guerra, è chiaro però che il museo era davvero lacunoso di opere di surrealisti, di artisti americani del dopoguerra o anche di fauvismo.
Tuttavia, prima di pensare a colmare le immense lacune della collezione, il vichingo dovette prima convincere molti che non era un barbaro venuto a saccheggiare i capolavori parigini come i suoi lontani antenati che spesso venivano a visitare le rive della Senna. Correva infatti voce che Beaubourg avrebbe posto fine all’inalienabilità delle opere e avrebbe venduto i quadri o le sculture che gli fossero stati inviati. Questo argomento insensato fu tuttavia invocato per rifiutare la cessione delle opere, ad esempio dalla vedova di Henri Laurens.
Al di là della sfumatura xenofoba che animava la buona borghesia artistica parigina, la questione non era affatto semplice. Il progetto di Georges Pompidou infatti non era di creare un semplice museo magari trasferendo le opere da un edificio all’altro. Il Beaubourg doveva essere più di un museo, un centro culturale composto da 4 dipartimenti: l’IRCAM (creazione musicale), il CCI (centro di creazione industriale, design), la BPI (la più grande biblioteca parigina ad accesso libero) e il dipartimento di arti visive che riuniva il museo nazionale d’arte moderna e il CNAC (Centro nazionale per l’arte contemporanea) e che si occupasse anche di mostre. Pontus Hulten era quindi responsabile di un “dipartimento” oltre che di poco meno della metà della superficie del centro.
Possiamo capire come certi spiriti tradizionalisti fossero spaventati dall’inquietante ambizione del presidente Pompidou, che peraltro morì nell’aprile del 1974, prima che il progetto fosse avviato. Eppure il Centre Pompidou riscosse fin da subito un enorme successo di pubblico. Beaubourg deve questo successo, durato tre anni, a Robert Bordaz e al team di grandi professionisti da lui riunito, primo fra tutti Pontus Hulten, nominato da Robert Bordaz nel 1973, sicuramente in seguito a colloqui con il Presidente della Repubblica. I coniugi Pompidou, veri amanti dell’arte contemporanea, si erano infatti recati in Svezia e avevano sperimentato la sua opera pionieristica al Moderna Museet di Stoccolma (1957-72). Pontus Hulten aveva quasi 50 anni e aveva una vasta esperienza come direttore di museo, progettista di mostre e anche regista. Beaubourg gli ha permesso di realizzare su larga scala i progetti che aveva realizzato in Svezia, vale a dire di svolgere un’azione senza compartimentalizzazione tra arte, letteratura, scienza e vita. Ha avuto delle forti amicizie nel mondo delle arti e soprattutto delle idee forti, una museografia aperta e modulare in linea con i suoi maestri Willem Sandberg dello Stedelijk Museum di Amsterdam e Alfred Barr del Moma, soprattutto l’esigenza di avere una visione enciclopedica della collezione che doveva quindi essere notevolmente arricchita, inoltre occorreva una ricca documentazione e un archivio per offrire sale di studio nel museo e alimentare le mostre, sulla base del dialogo tra arte contemporanea e arte moderna. La preoccupazione di accogliere capillarmente il pubblico si manifestò con l’orario di chiusura posticipato (tutti i giorni!) alle 22:00, infine avviò la progettazione innovativa di grandi mostre transdisciplinari in cui tutti i dipartimenti del Centro dovevano essere associati.
La combinazione di questi diversi assi ha reso il Centre Pompidou un luogo unico, illuminante, sia in Francia che all’estero. I suoi otto anni al Museo rappresentano non a caso il periodo d’oro del Centre Pompidou, e dovrebbero servire da riferimento per tutti coloro che lo hanno diretto dopo di lui.
Ma prima di presentare la sua prima grande mostra dedicata a Marcel Duchamp, che fu un vero colpo di fulmine per critica e pubblico, dovette superare molte prove. Per prima cosa dovette letteralmente sedurre uno per uno i padroni, i mecenati, i donatori o gli aventi diritto, convincendoli che il nuovo museo non sarebbe stato il cimitero dei capolavori, ma al contrario uno dei più grandi, belli e soprattutto più intelligenti musei d’arte moderna. Dovette poi riunire intorno a sé gli altri direttori di dipartimento e condurli verso il pluralismo. Pierre Boulez mostrò subito il suo entusiasmo, come pure l’équipe del CNAC, e poi le équipe del BPI, che avrebbero avuto un ruolo decisivo realizzando mostre e organizzando rassegne orali. Più difficile è stato con le squadre storiche del Museo e, per motivi competitivi, con quelle della CCI.
Ci è riuscito! Come è riuscito ad assemblare e a decollare questo aereo? Rimarrà sempre un elemento di mistero su questo punto. Eppure, l’entusiasmo è cresciuto con la magistrale trilogia “Parigi-New York”, “Parigi-Berlino”, “Parigi-Mosca”. Queste grandi mostre multidisciplinari richiesero mesi o anni di lavoro, in particolare “Parigi-Mosca”, per la quale i curatori trascorsero mesi in URSS alla ricerca di dipinti dimenticati o rifiutati e che oggi sono considerati capolavori. Gli straordinari cataloghi sono diventati elementi di collezione che ogni appassionato d’arte deve possedere e sono stati anche oggetto di riedizioni. Il segreto di queste mostre, del loro genio, era proprio Pontus Hulten, era la sua visione panoramica, la sua capacità di riunire oggetti di diversa provenienza e di formare un insieme armonico e in continua mutazione. A pensarci bene, questo era già lo spirito della sua dissertazione su Vermeer e Spinoza. Il pittore e il filosofo nacquero lo stesso anno e morirono a tre anni di distanza. Dopo l’ espulsione da Amsterdam, Spinoza si stabilì a Leida, e abitò a pochi chilometri dal pittore, guadagnandosi da vivere fabbricando lenti (si ritiene che Vermeer utilizzasse apparecchi ottici). Non è però una ricerca di aneddoti quella che propone lo svedese capace di spiegare in poche pagine e con reale comprensione la filosofia di Spinoza. Oltre ai passaggi che hanno suscitato sospetti di ateismo, commenta in particolare la sua visione del mondo come totalità, la sua visione di Dio come “tutta natura”, e la sua concezione della posizione dell’uomo come facente part di essa. Questa posizione dell’uomo tra le cose è la traccia fondamentale che egli identifica nei dipinti di Vermeer dove tutto è rappresentato allo stesso modo e immerso nella stessa luce, a differenza dei suoi predecessori come Pieter Saenredam che l’autore studiò all’inizio della sua presentazione. Questa rappresentazione della figura umana tra gli oggetti, in relazione ad essi, senza gerarchia, è ciò che ritroviamo nelle grandi mostre di Pontus Hulten, nutrito dalla meditazione spinozista davanti alle tele cristalline di Vermeer.
Se le mostre hanno permesso al Beaubourg di imprimere la propria impronta sul terreno culturale, è stato il Museo d’Arte Moderna a costituirne il centro di attrazione. Pontus Hulten, convinto che la collezione sia la spina dorsale di un Museo, e che un grande museo debba avere la collezione più completa possibile, contribuì in maniera esemplare al suo arricchimento. Ha potuto ottenere ricche donazioni come quella di Nina Kandinsky, che ha nominato madrina del museo, ha attirato mecenati molto generosi, come a fondazione Ménil o la fondazione Scaler, e ha effettuato numerose acquisizioni di opere moderne e contemporanee. Non solo aveva una visione ed un’energia instancabile. È stato anche fortunato! Una grande occasione è stata per lui la vittoria di François Mitterrand! Giscard infatti aveva le sue qualità, ma riteneva forse che la civiltà francese si fosse fermata al regno di Luigi XV. Arrivare all’impressionismo era già molto. Con Mitterrand e Jack Lang, suo ministro della Cultura, le circostanze favorirono lo svedese. Da un lato il budget del Beaubourg aumentò, dall’altro l’arte moderna trovava terreno più favorevole. In particolare con le donazioni di due grandi artisti surrealisti, Max Ernst e Man Ray, che invece il governo precedente aveva rifiutato. Senza contare le donazioni riversate, come quella di Daniel Cordier, realizzata da Michel e Louise Leiris: così Beaubourg in un giorno ricevette in cinque casse, forme di gesso avvolte in giornali, contenenti gli Architectones di Kazimir Malevich! Il Museo stesso ha smesso di essere un luogo freddo e un po’ formale per diventare uno spazio privilegiato di conoscenza e partecipazione. Oltre ad aprire fino alle 22 per agevolare la visita dei “lavoratori”, cosa che oggi viene copiata un po’ ovunque ma solo una volta a settimana (di notte), si è voluto modificare il ruolo tradizionale del guardiano del museo affinché quest’ultimo, spogliato della suo uniforme, divenisse un agente di trasmissione del sapere capace di fornire informazioni al visitatore garantendo inoltre la sicurezza delle opere. Non è stato invece possibile realizzare l’accesso ai depositi e allestire laboratori per bambini. Anche lo spazio museale è stato progettato in modo particolare. Beaubourg è un museo senza pareti, senza una sala fissa. Si tratta di un immenso altopiano che ha, all’incirca, la superficie di un campo di calcio. Quando iniziò il cambiamento, il museo aveva un piano e mezzo, oggi ne ha 2.
Questo palcoscenico sospeso sopra i tetti di Parigi, che si poteva vedere o contemplare attraverso numerose aperture, egli lo organizzò in piccoli luoghi delimitati da tramezzi mobili, con un’alternanza di spazio che presenta i capolavori dei principali movimenti e gallerie di studio che presentano disegni, documenti (libri, fotografie, testi), sculture africane e altre opere correlate. Questa alternanza tra opere importanti (ad esempio L’Arco nero di Kandinsky o Udnie di Picabia) spesso presentate “in maestosità” su una parete bianca e spazi di studio spesso costituiti da vetrine densamente popolate e commentate, ha permesso di evitare noiosi pannelli espositivi e ha dato al visitatore un’incomparabile sensazione di libertà e fluidità. Descritto come utopico dai suoi oppositori, questo progetto, che riecheggiava lo spirito del 1968, fu ampiamente acclamato dai parigini. Contro ogni aspettativa l’affluenza di pubblico è stata molto elevata fin dall’apertura.
Come aveva fatto a Stoccolma in particolare con La sposa di Niki de Saint Phalle, una gigantesca “ragazza” sdraiata sulla schiena, con le gambe divaricate e il cui pene spalancato fungeva da ingresso alla mostra, ha messo in risalto gli artisti contemporanei. I visitatori hanno scoperto l’imponente Crocrodromo di Zig et Puce (1978) di Tinguely, o le bellezze di Dubuffet nel 1983 (e i non-luoghi l’anno successivo). Per ragioni che appartengono alla storia ma di cui è difficile non rammaricarsi, lo svedese lasciò la sua orgogliosa nave nel 1984, viaggiò, aveva altri progetti, a Los Angeles, a Palazzo Grassi, poi a Parigi, nessuno, tuttavia, è stato degno di nota. Resta il geniale direttore del Dipartimento di Arti Visive del Centre Pompidou, alias Beaubourg, che partì una fredda mattina per il suo paese natale, l’estremo nord, senza una strada a suo nome, senza una statua, senza una stanza, senza nemmeno questa Legione di Onore che tuttavia diamo così facilmente ai geni della coordinazione piede-testa, o agli artisti della padella.
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