Siena: The Rise of Painting, 1300–1350. Le Metropolitan Museum de New York consacre une exposition impressionnante à la naissance de l’école de Sienne (texte original en français avec résumé en italien).

di Philippe PREVAL

Siena: The Rise of Painting, 1300–1350

La lecture des Vite de Vassari nous apprend que deux puissants fleuves prirent leur source dans l’atelier de Cimabue, l’un était Giotto, l’autre Duccio di Buonisegna (Sienne, vers 1255 – 1318 ou 1319). Du premier descend tout simplement l’art occidental avec une chaîne de transmission assez claire vers Masaccio, Piero della Francesca et Raphael. Le second, ne cherchant ou ne parvenant jamais à se détacher complétement du Moyen-Age ou de Byzance, donna naissance à la grande école siennoise qui finit par rejoindre le gothique international, terme ectoplasmique inventé à la fin du XIXe siècle pour caractériser une peinture médiévale qui se survit au temps de la première renaissance.

Le Metropolitan Museum de New York consacre à l’école siennoise une exposition sans équivalent, du moins en dehors d’Italie.

Les trois grands noms de la peinture siennoise, Duccio, les frères Lorenzetti et Simone Martini, y sont magnifiquement représentés dans une scénographie soignée où les dominantes grises et noires mettent en valeur les fonds d’or et le chatoiement particulier de la peinture à la détrempe. Elle est structurée en 12 sections d’inégal intérêt, essayant de donner une vision panoramique de école siennoise tant sur ses grands artistes que sur les plans économiques, politiques, géographiques et même épidémiologiques puisque la peste noire qui emporta les deux Lorenzetti en 1348 s’invite dans cette histoire. Mais plus que le programme analytique complet et parfois fastidieux, c’est l’intérêt d’une succession de chefs-d’œuvre qui emporte l’amateur.

De Duccio d’abord, le visiteur peut admirer quelques très belles œuvres de dévotion privée.

Figure 1: Duccio, Crucifixion avec saint Georges et saint Nicolas, MFA, Boston
Figure 2: Duccio, Vierge à l’enfant, entourée de saint Dominique et de sainte Aurea, National Gallery, Londres.

Mais c’est après cette introduction que le visiteur fait face au premier morceau de bravoure de l’exposition : la reconstitution, partielle mais impressionnante de la prédelle de la Maesta de Duccio. On se souvient que le peuple de Sienne avait porté en triomphe cet imposant retable biface d’environ 4 mètres sur 4 de l’atelier de l’artiste jusqu’à la croisée de transept de sa cathédrale, et que la ville avait dûment payé les musiciens qui avaient accompagné le cortège [1]. L’œuvre était à la fois le chef-d’oeuvre évident de la peinture locale, un objet sacré placé au centre de la cathédrale, un ex-voto, et un talisman contre les ennemis de la cité, en particulier la grande rivale Florence. Rarement les autorités d’un état ont été si conscientes de l’importance d’un « artiste contemporain ». Ce monument en soi a hélas été abîmé en 1771 lorsque les deux faces furent séparées et qu’il fut partiellement démembré. L’essentiel reste heureusement à Sienne, mais les panneaux de la prédelle du revers se sont trouvés éparpillés dans différentes institutions. C’est cette prédelle qu’a tenté de reconstituer le Met. Le résultat mérite le voyage.

Figure 3: reconstitution de la prédelle de la Maesta de Duccio
Figure 4: Duccio, l’annonciation

On note que l’archange Gabriel et la Vierge se situent dans deux espaces différents et que la séparation est marquée par une colonne. Ce dispositif, analysé magistralement par Daniel Arasse[2], sera abondamment repris dans les annonciations toscanes et même dans le livre d’heures d’Anne d’Evreux, exposé quelques mètres plus loin[3].

Figure 5: Duccio, La tentation du Christ, Frick Collection, New York
Figure 6: Duccio, La guerison de l’aveugle, NG, London

La génération suivante fut celle de Pietro Lorenzetti (Sienne 1280 – 1348) et de son frère Ambrogio (Sienne 1290 – 1348). Pietro est présent par différentes œuvres dont l’impressionnant polyptique Tarlatti que l’église Santa Maria della Pieve d’Arezzo a eu la générosité de prêter et l’Annonciation d’Ambrogio prêtée par la Pinacothèque nationale de Sienne.

Figure 7: Pietro Lorenzetti, Polyptyque Tarlati, Santa Maria della Pieve, Arezzo.
Figure 8: : Pietro Lorenzetti, Polyptyque Tarlati, Annonciation, Santa Maria della Pieve, Arezzo
Figure 9: Ambrogio Lorenzetti, Annonciation , Pinacothèque nationale de Sienne.

Le troisième cavalier c’est Simone Martini (Sienne 1284 – Avignon 1344) qui interviendra non seulement dans diverses villes italiennes comme ses prédécesseurs mais ira également travailler pour la cour pontificale à Avignon et sera donc à l’origine de l’éclosion de l’école d’Avignon.

L’exposition se livre à la reconstitution du polyptique dispersé du Palazzo Capitano et à celle du polyptique Orsini.

Figure 10: Simone Martini, polyptique dispersé du Palazzo Capitano.
Figure 11: Simone Martini, Vierge à l’enfant, Met, New York.

Le Polyptyque Orsini est un monument ! comme dirait Pierre Rosenberg, c’est de la peinture monumentale de dimension réduite. C’est, en effet, un retable portatif de 4 feuilles, consacré à la Passion du Christ, peint pour le cardinal Napoleone Orsini (Rome, 1260-Avignon, 1342) qui le fit exécuter ou l’apporta en France et l’y laissa. Au début du XVe siècle il était à la chartreuse de Champmol, qui fut aux ducs de Bourgogne ce que l’abbaye de Saint-Denis était aux rois de France. Son influence fut considérable sur de nombreux artistes français, en particulier sur les frères Limbourg qui réalisèrent les Heures du duc de Berry ou chez le grand sculpteur, Claus Sluter.

Figure 12: Simone Martini, le polyptique Orsini.
Figure 13: Simone Martini, le polyptique Orsini. revers: l’annonciation, les armes des Orsini.

L’exposition se termine par un ultime chef d’œuvre de Simone Martini, la Crucifixion du Fogg Art Museum d’une économie de moyen impressionnante et d’une spiritualité saisissante.

Figure 14: Simone Martini, Crucifixion, Fogg Art Museum, Harvard.

L’augmentation des frais de transport des œuvres d’art, qui se traduit par la mention du mécène qui les a payés sur chaque cartel, laisse penser que l’organisation de telles expositions est de plus en plus difficile. Il faut profiter de celles qui se présentent. Celle-ci est visible à New York jusqu’au 26 janvier 2025 et sera ensuite à Londres pour 6 mois.

Philippe PREVAL  Paris 1 Décembre 2024

NOTE

[1] Ed il giorno che la Maestà fu portata nella cattedrale, tutte le botteghe rimasero chiuse e il vescovo guidò una lunga fila di preti e monaci in solenne processione. Erano accompagnati dagli ufficiali del comune e da tutta la gente; tutti i cittadini importanti di Siena circondavano la pala con i ceri nelle mani, e le donne e i bambini li seguivano umilmente. Accompagnarono la pala tra i suoni delle campane attraverso la Piazza del Campo fino all’interno della cattedrale con profondo rispetto per la preziosa pala. I poveri ricevettero molte elemosine e noi pregammo la Santa Madre di Dio, nostra patrona, affinché nella sua infinita misericordia preservasse la nostra città di Siena dalle sfortune, dai traditori e dai nemici.
[2] Daniel Arasse , L’Annonciation italienne. Une histoire de perspective, Paris, 1999.
[3] https://www.metmuseum.org/fr/art/collection/search/470309

Versione Italiana

Siena: l’ascesa della pittura, 1300–1350

La lettura delle Vite di Vassari ci insegna che nella bottega di Cimabue nascevano due potenti correnti artistiche, una con Giotto, l’altra Duccio di Buonisegna (Siena, intorno al 1255 – 1318 o 1319). Dalla prima discende l’arte occidentale, seguendo un percorso che a Masaccio, Pierro della Francesca e Raffaello. La seconda, non cercando né mai riuscendo a staccarsi del tutto dal Medioevo o da Bisanzio, diede vita alla grande scuola senese che finì per unirsi al Gotico internazionale, termine ectoplasmatico inventato alla fine dell’Ottocento per caratterizzare la pittura che sopravvive al tempo della prima rinascita.
Il Metropolitan Museum di New York dedica alla scuola senese una mostra che non ha equivalenti, almeno fuori dall’Italia. I tre grandi nomi della pittura senese, Duccio, i fratelli Lorenzetti e Simone Martini, sono magnificamente rappresentati in un’accurata scenografia dove le dominanti del grigio e del nero mettono in risalto i fondi oro e i particolari riflessi della tempera. Il percorso espositivo è strutturato in 12 sezioni di diverso interesse, che permettono una visione panoramica della scuola sia riguardo i grandi artisti sia sul contesto economico, politico, geografico e anche epidemiologico poiché la peste nera che portò via i due Lorenzetti nel 1348 entra anch’essa in questa storia. Ma più che il programma analitico completo e talvolta noioso, è l’interesse per una vera sequenza di capolavori a conquistare il visitatore. Di Duccio innanzitutto il si potranno ammirare alcune bellissime opere di devozione privata. Ma è dopo questa introduzione che il visitatore si trova di fronte alla prima grande occasione della mostra: la parziale ma suggestiva ricostruzione della predella della Maesta di Duccio. Ricordiamo che i senesi avevano portato in trionfo questa imponente pala bifacciale di circa 4 metri per 4 dalla bottega dell’artista fino al transetto della sua cattedrale, e che la città aveva debitamente pagato i musicisti che avevano accompagnato il corteo[1 ]. L’opera era allo stesso tempo l’indiscusso capolavoro della pittura locale, un oggetto sacro posto al centro della cattedrale, un ex voto, e una sorta di talismano contro i nemici della città, in particolare la grande rivale Firenze. Raramente le autorità statali sono state così consapevoli dell’importanza di un “artista contemporaneo”. Questo capolavoro fu purtroppo danneggiato nel 1771 quando le due parti furono separate e venne parzialmente smembrato. La parte essenziale resta fortunatamente a Siena, ma i pannelli della predella del rovescio sono stati rinvenuti sparsi in diversi istituti. È questa predella che il Met ha tentato di ricostruire. Il risultato vale il viaggio.
Notiamo che l’arcangelo Gabriele e la Vergine si trovano in due spazi diversi e che la separazione è segnata da una colonna. Questo dispositivo, analizzato magistralmente da Daniel Arasse[2], sarà ripreso ampiamente nelle annunciazioni toscane e perfino nel Libro d’Ore di Anne d’Evreux, esposto pochi metri più avanti[3].
La generazione successiva fu quella di Pietro Lorenzetti (Siena 1280 – 1348) e di suo fratello Ambrogio (Siena 1290 – 1348). Pietro è presente attraverso diverse opere tra cui l’imponente polittico Tarlatti che la chiesa di Santa Maria della Pieve di Arezzo ha avuto la generosità di prestare come l’Annunciazione di Ambrogio prestata dalla Pinacoteca Nazionale di Siena. Il terzo cavaliere è Simone Martini (Siena 1284 – Avignone 1344) che non solo interverrà in diverse città italiane come i suoi predecessori ma andrà a lavorare anche per la corte pontificia ad Avignone e sarà quindi all’origine della fioritura della scuola di Avignone. L’esposizione si concentra sulla ricostruzione del polittico sparso di Palazzo Capitano e su quella del polittico Orsini. Il Polittico Orsini è un monumento! Si tratta, come direbbe Pierre Rosenberg, di un dipinto monumentale di dimensioni ridotte. Si tratta, infatti, di una pala portatile di 4 fogli, dedicata alla Passione di Cristo, dipinta per il cardinale Napoleone Orsini (Roma, 1260-Avignone, 1342) che la fece eseguire o la portò in Francia e lì la lasciò. All’inizio del XV secolo si trovava nella certosa di Champmol, che stava ai duchi di Borgogna come l’abbazia di Saint-Denis stava ai re di Francia. La sua influenza fu notevole su molti artisti francesi, in particolare sui fratelli Limbourg che crearono le Ore del Duca di Berry o sul grande scultore Claus Sluter La mostra si conclude con l’ultimo capolavoro di Simone Martini, la Crocifissione del Fogg Art Museum, con impressionante economia di mezzi e sorprendente spiritualità.
L’aumento dei costi di trasporto delle opere d’arte, che si riflette nella menzione su ogni etichetta del mecenate che le ha pagate, ci fa capire che l’organizzazione di tali mostre è sempre più difficile. Dobbiamo approfittare quando si presenta l’occasione. La mostra sarà visibile a New York fino al 26 gennaio 2025 e poi sarà a Londra per 6 mesi.
Il giorno che la Maestà fu portata nella cattedrale, tutte le botteghe rimasero chiuse et il vescovo guidò una longa fila di preti e monaci in solenne processione, cui partecipavano il funzionario del comune e tutto il popolo; tutte le città importanti del senese circondano la porta con la maniglia, la danno al bambino e lo seguono accompagnando la pala tra i suoni delle campane attraverso la Piazza del Campo fino all’interno del Duomo. Dove si prega la Santa Madre di Dio, nostra patrona, affinché nella sua infinita misericordia preservi la nostra città di Siena sfortune, dai traditori e dai nemici.